Communiquer de cœur à cœur. Dans la tradition zen, la communication authentique est appelée « i shin den shin », autrement dit d’esprit à esprit, de cœur à cœur. C’est ainsi dans le zen que se fait la transmission du maître à l’élève. Cette forme de communication est possible dès lors que notre esprit se tend, se penche vers celui de l’autre, pour le sentir, le comprendre et lui faire passer les messages. On comprend bien qu’une telle posture n’est pas compatible avec l’esprit de jugement, les préjugés et les projections. Elle exige au contraire une qualité d’accueil « neutre », mais teintée de bienveillance qui va favoriser la rencontre. Que d’étiquettes collons-nous aux enfants… Positives ou négatives, elles les conditionnent, les restreignent, elles ne respectent pas leur vraie nature. Prendre le temps d’observer son rythme, ses goûts et préférences, ses talents et ses limites est indispensable au parent qui se veut l’accompagnateur de son enfant sur son chemin de vie. Et s’il veut que ses paroles portent et éclairent, il doit les mettre lui-même en pratique. Si la parole du maître vaut de l’or aux oreilles de l’élève, c’est parce qu’elle est le fruit d’une pratique. Un bon exemple vaut mieux qu’un long discours. Le maître transmet ce qu’il met en acte dans sa vie de tous les jours. Ainsi l’élève, le disciple, peut recevoir sa parole dans la confiance et s’appuyer sur lui pour cheminer dans ses propres difficultés. Un kôan illustre la transmission « i shin den shin » : « Les deux miroirs s’illuminent mutuellement. »
À un élève qui lui demandait quelle était la nature du Bouddha, Houang-Po répondit : « Le balai des toilettes ».
À méditer :
– La discipline juste n’est ni prison ni carcan. C’est la falaise d’où l’enfant prendra son envol.
– Se tromper ne signifie pas que l’on n’a pas fait de son mieux.
– Qu’il vous voie donner, il donnera. Qu’il vous voie aimer, il aimera. Qu’il vous voie confiante, il sera confiant.
– La parole blessante que vous décochez à votre conjoint devant votre enfant, atteint ce dernier en plein cœur.
Vivre l’extraordinaire de l’ordinaire
La pratique du zen est une célébration du quotidien, de ce qui est, de ce que l’on fait, ici et maintenant. Rien n’est banal, rien n’est trivial. Tout est pratique, laver son bol, balayer la cour, préparer un repas… À un élève qui lui demandait quelle était la nature du Bouddha, Houang-Po répondit : « Le balai des toilettes ». La réplique n’était pas destinée à se moquer du disciple, mais à lui faire comprendre, dans le style direct et rude des patriarches, que la hiérarchie est une illusion, une vue de l’esprit, elle n’a pas de réalité. On songe à ce propos à la phrase de Long Chen Pa, citée par Jack Kornfield dans son livre Après l’extase, la lessive (La Table Ronde) : « Parce que chaque chose n’est rien d’autre que ce qu’elle est, on ne peut qu’éclater de rire ». Tel est le traitement que mérite, selon le zen, ce que nous tenons pour de grandes choses : la réussite, l’argent, les honneurs et même l’éveil spirituel. C’est en revanche, le quotidien, avec sa cohorte de tâches, de contraintes et de menus détails, qui mérite toute notre attention parce qu’il constitue la meilleure école de vie. Il nous apprend à prendre soin et à vivre ensemble tout en faisant continuellement l’expérience de l’impermanence. C’est dans cette école de la patience, de l’humilité et de la gratitude que nous devrions nous inscrire en conscience, chaque matin avec nos enfants.
À méditer :
– Dans une pièce en ordre où circulent l’air et la lumière, l’esprit atteint le calme.
– La faute se cache toujours dans l’inattention.
– Nos actes quotidiens se déroulent à l’intérieur de la vérité même. (Maître Xu Yin)
– Gaspiller l’eau et le pain revient à insulter la vie.