Lama Shédroup : « Développer la présence à soi et à l’autre »

- par Henry Oudin

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Sa rencontre avec le bouddhisme Vajrayana et Lama Guendune a changé complètement le parcours de vie de cet ancien maçon de 63 ans. Près de quarante années de pratique plus tard, Lama Shédroup dispense ses enseignements dans les centres de la lignée Karma Kagyu et accompagne, en tant qu’aumônier, les détenus de Nouvelle-Aquitaine.

Lama Shédroup vient de terminer une retraite de quinze jours au Bost (cf. encadré), en Auvergne. Dégarni, le bouc taillé en triangle, Shédroup ne porte pas la robe bouddhiste. Vêtu d’une polaire, d’un gilet et d’un pantalon, il a pour habitude de s’habiller « en civil » lors de ses enseignements ou de ses visites en prison. Élevé par des parents plutôt anarchistes et anticléricaux, à 20 ans, après un voyage de cinq ans en Inde et au Népal, il revient en France, s’installe à la campagne, suit une formation avec des compagnons en maçonnerie et, son cursus terminé, s’installe en Dordogne, en 1981. Un choix qui ne doit rien au hasard, mais au lien qu’il a noué avec Lama Guendune lors d’un passage au monastère de Dhagpo Kagyu Ling.

« On garde les pieds sur terre tout en ayant la tête dans le ciel. »

Un an plus tard, en 1982, Shédroup devient résident à Dhagpo Kagyu Ling. Fidèle à sa formation, avec l’aide de deux autres disciples expérimentés dans la construction et des bénévoles, il participe à la rénovation de la maison des lamas et du réfectoire. Pendant les cinq premières années, il continue de travailler sur des petits chantiers. Cette activité lui permet de maintenir un équilibre : « On garde les pieds sur terre tout en ayant la tête dans le ciel. C’est important car, parfois, la pratique peut nous pousser à être déconnectés de l’environnement », convient-il.

« Toute activité tournée vers l’esprit est importante pour soi et pour nos relations aux autres. »

Au cours de deux retraites de trois ans et trois mois, de 1987 à 1991 et de 1991 à 1994, il apprend les pratiques liées au Vajrayana. « J’y ai développé des capacités que je continue à entretenir au quotidien ». Et, désormais, chacune de ses journées commence et se termine par une heure de méditation et de récitation de mantras. « Le plus important, quand on médite, c’est notre capacité à être conscient de ce qui se passe et de revenir dans l’instant présent. Ça peut être simple, parfois plus complexe. Il faut voir le jeu des émotions qui se met en place ».

Excitation ou déception, des pièges de l’orgueil

Ces pratiques quotidiennes, au contact du Sangha, lui apportent une plus grande clarté d’esprit et d’attention à ce qui est. « Si je médite de manière trop expéditive, je remarque que je suis moins disponible aux autres », dit-il. Elles influent aussi sur la réflexion, l’étude de textes et la préparation des enseignements. Les transmettre est une grande responsabilité : « Je ne dois pas dire des choses qui pourraient être mal comprises et apprendre à ceux qui me suivent à ne pas tomber dans le piège de l’orgueil, qui prend la forme de la déception lorsque ça ne marche pas ou de l’excitation lorsque ça fonctionne ». Lama Shédroup ajoute : « Autre point important, la précision : je dois privilégier non pas ce qui me semble important pour moi, mais ce qui aide les auditeurs ». Dans les prisons de Nouvelle-Aquitaine par exemple, où il officie en tant qu’aumônier depuis 2014, même méthode : « Je rencontre des gens qui demandent à me voir pour des raisons très différentes. Le plus important, c’est de savoir quelle part de l’enseignement va aider la personne détenue, ici et maintenant. Ça implique de chercher en soi les ressources pour développer la clarté de l’esprit et la présence à l’autre ».

Tout cela, Lama Shédroup le partage également, autour de la fin de vie, avec des personnes qui travaillent dans des associations investies dans les soins palliatifs. Parfois, sur demande, il utilise la sophrologie et dispense des séances à des petits groupes en guise de méthode de relaxation préalable aux séances de méditation. Sa motivation principale, aider, a poussé l’aumônier à approfondir cette compétence, car précise-t-il, « toute activité tournée vers l’esprit est importante pour soi et pour nos relations aux autres »

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Henry Oudin

Henry Oudin est un érudit du bouddhisme, un aventurier spirituel et un journaliste. Il est un chercheur passionné des profondeurs de la sagesse bouddhiste, et voyage régulièrement pour en apprendre davantage sur le bouddhisme et les cultures spirituelles. En partageant ses connaissances et ses expériences de vie sur Bouddha News, Henry espère inspirer les autres à embrasser des modes de vie plus spirituels et plus conscients.

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