Le mont Kailash, le pèlerinage de mes rêves

- par Henry Oudin

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Récit de la découverte de la montagne mythique des traditions bouddhistes.

1er juin 2018, dans ma chambre à Katmandou, au Népal. La Chine refuse tous les permis pour aller au Tibet. Des dizaines de groupes d’étrangers se voient ainsi décliner l’accès du Toit du Monde sans qu’aucun motif valable ne soit avancé de la part du gouvernement. Mais mon ami tibétain Tsering a plus d’un tour dans son sac. Alors que je me morfonds en pensant à mon rêve d’enfance devenu impossible, il m’obtient une autorisation in extremis, la veille au soir du départ prévu. Mon contact népalais n’en croit pas ses yeux quand il se retrouve avec mon permis entre les mains : il vient d’annuler quatre de ses groupes. Incrédule, il demande à l’ambassade de Chine de Katmandou si ce n’est pas un faux permis tellement ce tour de force le surprend !

La montagne magique, le mont Kailash, appelé aussi « Montagne de Cristal » me fait rêver depuis des décennies. Mes lectures adolescentes d’Alexandra David Neel, Lobsang Rampa et surtout de Lama Annagarika Govinda m’ont forgé un imaginaire prolixe autour de tout ce qui la concerne. Sur le plan religieux, elle est la montagne la plus sacrée des traditions bouddhistes, hindoue, Bön et Jaïn. Sur le plan physique, elle est non seulement un bloc monolithique impressionnant au milieu du plateau tibétain, mais aussi le « robinet de l’Asie » : c’est là que naissent quatre des plus grands fleuves d’Asie : Sutlej, Bramatourpre, Indus et Karnali, l’un des affluents du Gange. Enfin, sur un plan spirituel et symbolique, elle est l’axe du monde, le mont Meru, Chakrasambavha, et pour moi, un rêve, un fantasme absolu.

Les drôles de tours du Dolma-la

17 juin, 5 600 mètres d’altitude sur le plateau tibétain (Chine). J’y suis. Mon rêve est en train de devenir réalité. Quelle étrange conjoncture ! Il a fallu de la chance, un bon karma, de l’abnégation et de la volonté pour arriver à le rendre possible. Mes pas se ralentissent à mesure que j’approche des drapeaux à prières et du col du Dolma-la, à 5 600 mètres d’altitude. J’ai le souffle court. Une grand-mère tibétaine, son moulin à prières en activité, me dépasse, accompagnée de sa petite fille de sept ans. Je reste interloqué. Après des années à arpenter les sentiers himalayens je prends encore une leçon d’humilité. La ferveur des pèlerins du mont Kailash leur donnerait-elle des ailes ?

Les pèlerins tibétains, naturellement acclimatés à l’altitude, entreprennent de faire une multitude de Khora, de tours de la montagne sacrée, pour obtenir des mérites.

Arrivé au col, à la fin d’une longue pause qui me permet d’observer les caravanes de yacks et de pèlerins en prosternation, une autre explication vient à mon esprit. Alors que beaucoup d’Occidentaux comme moi viennent rendre visite au mont Kailash et en font une seule fois le tour, les pèlerins tibétains, naturellement acclimatés à l’altitude, entreprennent de faire une multitude de Khora, de tours de la montagne sacrée, pour obtenir des mérites. En une journée, ils font les 54 kilomètres, soit un tour entier de la montagne, puis s’arrêtent 24 heures avant de recommencer ! Et ainsi de suite jusqu’à épuisement des vivres, du budget, du timing…. La vieille femme et l’enfant sont déjà loin, elles n’en sont sûrement pas à leur premier ni à leur dernier tour.

Arrivé au sommet du Dolma-la, je retrouve yacks, pèlerins tibétains et indiens et quelques touristes. L’esprit du Kailash est en nous, nous porte, nous rassemble, comme un aimant. Aucun esprit de compétition entre bouddhistes tibétains acclimatés, hindous indiens en mode survie et les touristes dont je suis, puisque je ne partage pas la même foi. C’est le voyage de mes rêves. Je ne ferai le tour qu’une fois. Je prends mon temps pour en savourer chaque instant

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Henry Oudin

Henry Oudin est un érudit du bouddhisme, un aventurier spirituel et un journaliste. Il est un chercheur passionné des profondeurs de la sagesse bouddhiste, et voyage régulièrement pour en apprendre davantage sur le bouddhisme et les cultures spirituelles. En partageant ses connaissances et ses expériences de vie sur Bouddha News, Henry espère inspirer les autres à embrasser des modes de vie plus spirituels et plus conscients.

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