Pour moi, être bouddhiste c’est faire l’épreuve de chaque moment de sa vie de la manière la plus entière possible.
Nous passons tous au travers de moments de peine et de chagrin, de difficultés plus ou moins aiguës. Le bouddhisme nous montre qu’il est possible de travailler concrètement avec ces situations, de ne pas se contenter de toujours blâmer les circonstances extérieures ou les autres et de devenir ainsi vraiment adulte.
Le Bouddha nous invite à être toujours plus précis et soucieux de ce que nous vivons, de nos pensées, de nos émotions et de nos actions. En ce sens, le bouddhisme ne procède pas d’un acte de foi ou de l’acquisition de connaissances doctrinaires. Dieu est même absent de cette tradition. L’enseignement du Bouddha consiste à entrer dans un rapport vivant à toute expérience que nous traversons. Toutefois, le terme d’expérience n’est pas aussi parlant qu’il le faudrait à cause de son usage actuel dans les sciences, qui l’envisagent comme expérimentation et non comme réalité personnelle, concrète, vivante.
Méditer n’est pas une démarche facile
Marcher dans les pas du Bouddha, c’est d’abord faire cette découverte que le présent ne se montre pas de lui-même. En ce sens, l’invitation fondamentale du Bouddha se réalise dans la pratique de la méditation.
Mais pour le bouddhisme, la méditation ne consiste pas comme le plus souvent pour nous, à être détendu, détaché et « zen », mais à faire un travail très précis.
C’est parce que le Bouddha voulait être au plus près des choses telles qu’elles sont, c’est parce qu’il voulait regarder sa propre expérience avec une grande acuité, qu’il s’assit et médita. Non pour se détendre.
Méditer dans cette perspective consiste à faire un effort long et patient pour approcher ce qui est, ce que l’on vit, ce qui nous traverse.
Ce n’est pas une démarche facile. Il peut nous sembler plus réconfortant de rester à côté de soi et des choses, de suivre des règles, de se prouver qu’on est bon, qu’on a raison et que les problèmes viennent des autres. Les hommes ont une forte tendance à fonder des institutions auxquelles ils abandonnent leur intelligence. Ils se sacrifient à la cause – l’entreprise, la société, l’administration, l’Église à laquelle, par les circonstances de la vie, ils sont rattachés. Le piège est terrible.
« C’est parce que le Bouddha voulait être au plus près des choses telles qu’elles sont, c’est parce qu’il voulait regarder sa propre expérience avec une grande acuité, qu’il s’assit et médita. Non pour se détendre. »
Le Bouddha invite à goûter, éprouver, traverser moment après moment notre existence, sans jamais renoncer à notre propre intelligence, sans jamais déposer entre les mains de quiconque sa liberté.
Être bouddhiste consiste à éprouver que nos buts habituels ne peuvent suffire à nous combler. Nous ne pouvons pas trouver réellement secours en eux. La recherche de plaisirs, de profits ou encore de davantage de pouvoirs ne comble pas assez. Nous sentons bien une certaine excitation ici et là. Mais l’essentiel fait défaut.
Méditer, c’est en ce sens partir à la recherche de l’essentiel, qui est là, au cœur de nos propres existences.