Au Tibet comme ailleurs, les enfants sont parfois turbulents. Même quand ils sont des moinillons.
Cet hiver-là, dès la nuit venue, les plus jeunes membres d’un monastère réputé pour sa discipline avaient pris l’habitude de jouer aux fantômes, ravis d’effrayer leurs aînés, qui comme la plupart des Tibétains (pas qu’eux, d’ailleurs) craignent énormément les esprits. Les faits remontèrent jusqu’aux oreilles du maître de discipline, qui n’eut aucun doute sur l’identité de l’instigateur du petit jeu nocturne.
Plutôt que d’intervenir directement et de punir les mauvais plaisants, il préféra prendre la parole à l’issue d’une cérémonie commune : « Vous savez comme moi que, depuis quelques jours, notre communauté est hantée la nuit par des esprits malfaisants. Mais ne vous inquiétez pas, je connais un moyen efficace pour vous en prémunir. Dès ce soir, je recommande à tous les moines adultes de se munir de quelques gros cailloux quand ils déambuleront dans l’enceinte. Sitôt qu’ils apercevront la moindre apparition, qu’ils la visent avec soin pour ne pas la rater. Cela aura pour effet de la faire se volatiliser, croyez-moi ! ».Inutile de préciser que personne n’eut à utiliser de cailloux. Les fantômes disparurent le jour même, comme par enchantement