S’inclinant devant Ajahn Sulak à 90 ans

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Ajahn Sulak Sivaraksa. Image reproduite avec l’aimable autorisation de l’auteur

Le 27 mars, Ajahn Sulak Sivaraksa du Siam a célébré l’achèvement de 90 ans dans ce cycle planétaire de la vie.* Je souhaite à Ajahn Sulak une bonne santé et de nombreuses autres années vitales. Je souhaite la continuation de ses enseignements féroces, sa fidèle amitié et sa grande compassion.

J’ai entendu parler d’Ajahn Sulak pour la première fois lorsque je travaillais chez Parallax Press en 1990. J’ai eu l’occasion de lire son livre Graines de paix : une vision bouddhiste pour le renouveau Société tel qu’il était en cours d’édition. Sulak a donné l’articulation la plus claire du bouddhisme engagé que j’aie rencontrée. C’était passionnant de rencontrer sa brillante critique de la modernité et son articulation d’un bouddhisme inclusif et engagé qui respectait ses racines Theravada et Mahayana, et articulait une vision intégrant la souffrance personnelle et les structures sociales de cupidité, de haine et d’illusion que nous tissons dans des systèmes entiers de souffrance. Mais, au-delà de ses écrits, j’ai reconnu le courage de ses actions, qui rappellent les prophètes d’autrefois.

Ce courage a conduit Ajahn Sulak à dénoncer le coup d’État militaire des généraux thaïlandais en février 1991. Ses paroles fortes ont poussé les généraux à demander son arrestation sous l’accusation médiévale de lèse majesté– pour avoir soi-disant insulté le roi de Thaïlande. Il a fui le pays – ni pour la première ni pour la dernière fois de sa vie – ce qui l’a amené chez nous au Berkeley Zen Center, où il a séjourné au début de 1992 et où j’ai appris à bien le connaître.

En février 1992, j’ai quitté Berkeley pour assister à la quatrième conférence du Réseau international des bouddhistes engagés (INEB) en Thaïlande. Sur le perron ce matin-là, j’ai embrassé et salué Ajahn Sulak. J’ai ressenti une ironie inconfortable en me dirigeant vers le pays d’origine d’Ajahn Sulak, prévoyant de rester chez lui à Bangkok pendant qu’il était exilé à Berkeley chez moi. C’est ici à Berkeley que ma femme Laurie et moi avons commencé à travailler avec Ajahn Sulak sur ses mémoires, La loyauté exige la dissidence : autobiographie d’un bouddhiste engagé. Ce n’est qu’après six mois supplémentaires que Sulak a pu retourner en Thaïlande, et il a fallu plusieurs années avant que l’accusation de lèse majesté a été licencié. Il ferait à nouveau face à de telles accusations en 2006, 2008 et 2014.

Je l’appelle Ajahn Sulak, un terme d’honneur et de respect pour un vrai professeur. Il est l’un de mes vrais professeurs. Au cours des 30 dernières années, à travers tant de crises qui ont affligé notre monde, j’ai travaillé en étroite collaboration avec Sulak et avec l’INEB, l’organisation dynamique qui n’a pu prendre forme qu’à partir du réseau d’amitiés internationales qu’Ajahn Sulak a cultivé au fil des ans. . Travaille sur La loyauté exige la dissidenceje me suis familiarisé avec l’arc de la vie de Sulak Sivaraksa et les principes du Dharma, de la démocratie et de l’amitié spirituelle dont Sulak ne s’est jamais écarté.

La 20e Conférence biennale du Réseau international des bouddhistes engagés (INEB). Image reproduite avec l’aimable autorisation de l’INEB

Je suis parfaitement conscient qu’une grande partie de la richesse de ma vie bouddhiste engagée m’est parvenue grâce à Ajahn Sulak, des amis (Pali : kalyana-mitta; Skt : kalyana-mitra), des manières de penser notre monde troublé, des contacts organisationnels au-delà de nombreuses frontières. Souvent, j’ai reçu un appel téléphonique de sa part tard dans la nuit, juste pour prendre contact alors qu’il voyageait à travers les États-Unis. Lors de nos visites à Berkeley, qui étaient autrefois fréquentes, j’ai vu Ajahn Sulak s’asseoir à la table de la cuisine, sortir son carnet d’adresses usé et téléphoner systématiquement à tous ses amis locaux. Beaucoup de ces amis et acolytes sont devenus mes propres partenaires de travail et camarades. L’écriture et la pensée de Sulak continuent de m’influencer. Ses provocations font toujours mouche, pour les amis comme pour les adversaires.

Certes, nous n’avons pas toujours été d’accord sur les grandes et les petites choses, et nous avons eu nos clashs et nos disputes, qui, finalement, n’ont pas vraiment d’importance. En même temps, la connexion et le respect entre nous étaient toujours vivants. Notre amitié dure depuis de nombreuses années, à travers les continents, malgré des disputes et des conflits, qui ne sont pas pertinents ici.

Aujourd’hui, Ajahn Sulak a atteint l’âge de 90 ans. Il continue de créer de bons ennuis, et je suis honoré de me tenir à ses côtés, de le regarder, d’apprendre et de célébrer.

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François Leclercq

François Leclercq est le fondateur de Bouddha News, site internet qui a pour but de diffuser des informations et des conseils pratiques sur le bouddhisme et la spiritualité. François Leclercq est né et a grandi à Paris. Il a étudié le bouddhisme à l'Université de Paris-Sorbonne, où il est diplômé en sciences sociales et en psychologie. Après avoir obtenu son diplôme, il s'est consacré à sa passion pour le bouddhisme et a voyagé dans le monde entier pour étudier et découvrir des pratiques différentes. Il a notamment visité le Tibet, le Népal, la Thaïlande, le Japon et la Chine.

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