Cette reconnaissance est complexe : si les plus anciennes mudras (« gestes symboliques ») correspondent souvent à un événement précis, la posture seule ne permet pas de reconnaître une scène, un événement ou un personnage ; elle participe, au même titre que le reste du corps, à une expression globale qui, elle, permettra l’identification recherchée.
Nombre d’attitudes et de postures puisent leurs plus anciennes sources dans les traités de yoga et de danse de l’Inde ancienne ; la posture de méditation, posture la plus habituelle pour représenter le Buddha historique, est même représentée sur des sceaux de la civilisation de l’Indus, il y a quatre mille ans.
On a coutume de distinguer les attitudes assises, agenouillées et à demi levées, debout, couchées, volantes et conjointes. Dans ce premier volet consacré aux postures assises, nous présentons les principales attitudes adoptées dans l’iconographie bouddhique, toute analyse exhaustive étant impossible, car, lorsque l’on rentre dans le détail des représentations, le nombre de postures est illimité !
1-Les postures assises avec les deux jambes repliées
La posture assise, simple en apparence, se révèle complexe lorsqu’on analyse toutes les combinaisons possibles : jambes plus ou moins croisées avec les deux plantes de pieds visibles ; pied gauche sur la cuisse droite, le pied droit étant invisible ; pied droit sur la cuisse gauche, le pied gauche étant invisible ; cuisses légèrement relevées avec les pieds reposant alors sur le siège ; un pied posé sur une cuisse et l’autre sur le siège…
La posture du lotus
La posture de méditation ou du lotus, padmasana – appelée aussi vajrasana ou vajraparyanka (posture du diamant) -, est la plus célèbre de toutes les postures, c’est celle adoptée par le Bouddha Gautama Shakyamuni lors de ses méditations au pied de l’arbre de la bodhi, lors de l’assaut de Mara et lors de son Éveil.
Les jambes sont croisées, les pieds reposent sur la cuisse opposée, les deux plantes des pieds sont apparentes. Cette posture de l’ascète en méditation, outre le Buddha, concerne toutes les déités et les personnages historiques du panthéon bouddhique lors de leur méditation.
Quelques autres postures assises avec jambes repliées
Il existe des variantes de la posture du lotus ; nous en présentons ci-dessous quelques schémas : jambes plus ou moins croisées, genoux plus ou moins levés, plantes de pieds plus ou moins visibles.
Dans la posture « en demi lotus », virasana ou ardhapadmasana, symbole de l’héroïsme, un seul pied est apparent ; l’un des deux pieds repose sur le sol et la cuisse opposée le recouvre tandis que l’autre pied, dont on aperçoit la plante, repose sur la cuisse.
Dans l’attitude noble, sattvaparyanka, le personnage est assis en tailleur, les jambes sont repliées l’une sur l’autre, elles ne sont pas croisées, les pieds reposent sur le sol ou le siège, une seule plante des pieds est visible.
Dans l’attitude sattvasana, les pieds sont croisés au niveau des chevilles, le pied droit est situé devant ; elle est le symbole de l’attention à autrui.
Dans la posture utkutakasana ou yogasana, les genoux sont relevés et les mains reposent dessus, les jambes sont croisées au niveau des chevilles, les plantes des pieds reposent sur le sol ou sur le siège. Cette posture est adoptée par les ascètes en méditation ou par la déesse tantrique Uluki de la lignée d’Amitabha.
2-Les postures assises avec une jambe repliée
La posture d’aisance royale – maharajalilasana
Dans cette posture, le personnage est assis, les deux jambes sont écartées, la jambe gauche est pliée sur le siège, orteils recourbés vers le sol ou allongés sur le côté ; la jambe droite est redressée, genou plié, orteils recourbés vers le sol, le bras repose sur le genou par le poignet ou l’avant-bras ; l’attitude inverse jambe droite pliée et jambe gauche redressée porte le même nom.
La posture du penseur – mahakarunika
La posture de personnages penseurs est très ancienne : on trouve des représentations de Mara sous cette forme dès le IIe siècle av. J.-C. sur la barrière du stupa de Bharhut, mais c’est surtout dans les reliefs gandhariens que les exemples anciens foisonnent, à l’exemple du jeune Siddhartha pendant la première méditation, lors de la grande renonciation et lorsque les dieux l’invitent à prêcher après son illumination ; de même, des disciples et des dévots (parayaṇa) de Shakyamuni sont représentés dans cette attitude ; enfin, et toujours au Gandhara, les exemples les plus célèbres montrent des représentations d’Avalokitesvara. Selon Louis Frédéric cette attitude passa ensuite en Chine, en Corée puis au Japon ; on trouve dans ces différents pays de très belles sculptures de Maitreya, de Manjusri et d’Avalokitesvara dans cette posture.
Il existe de nombreuses variations de cette attitude, paume de la main ou index posé sur la joue ou sur le front, attitude penchée sur le côté droit ou sur le côté gauche…
La posture avec jambe droite pendante – lalitasana
Lalitasana ou ardhaparyanka ou lalitaksepa : les deux jambes sont écartées, la jambe gauche est repliée sur le siège et la plante touche la cuisse droite, la jambe droite pend, c’est un symbole de sérénité.
La posture avec jambe gauche pendante – vamardhaparyanka
Dans l’attitude inverse, vamardhaparyanka ou vamordhvaparyanka, la jambe droite est repliée et la jambe gauche pend ; cette posture est fréquente chez Manjusri, mais on la trouve chez d’autres déités comme Vajrapani.
3-Les postures assises avec les deux jambes allongées
L’attitude favorable, bhadrasana, ou attitude aux pieds pendants, pralambapasana, est appelée « posture à l’européenne » ou « posture royale ». Selon le cas, les jambes sont droites ou légèrement écartées, les pieds reposent sur le sol ou sur un coussin. Cette posture est adoptée dans tous les pays pratiquant le bouddhisme, tous les styles d’art bouddhique et toutes les écoles. Maitreya est souvent représenté sous cette forme que l’on trouve aussi dans l’art de Dvaravati, comme dans l’illustration choisie.
La posture agenouillée – januparyanka
La déité peut être agenouillée sur le côté gauche ou sur le côté droit comme dans la présente illustration où le genou droit repose sur le sol, la jambe gauche est repliée et soutient le coude. Cette statue représente Acala, déité protectrice du nord-est et des enseignements de Shakyamuni. Cette déité est représentée en xylographie dans plusieurs ouvrages canoniques ou iconographiques des XVIIe et XVIIIe siècles et en statue dans l’une des chapelles du pavillon Pao-hsiang Lou de la cité interdite de Pékin.
En partenariat avec l’Institut d’Études Bouddhiques (https://bouddhismes.net/)