Nathalie Rodary : « Le seul progrès qui fait sens est celui des consciences. »

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Coach de direction, conférencière, artiste à ses heures, Nathalie Rodary propose une voie de transformation inspirée de la philosophie bouddhiste. Pour se reconnecter à soi et éclairer de l’intérieur.

Depuis vingt-cinq ans qu’elle accompagne des dirigeants, Nathalie Rodary a peaufiné son credo, celui d’un « leadership humaniste ». Les quelque 350 chefs d’entreprise passés par son cabinet Assary sont invités à se libérer de leur ego. La coache est convaincue que c’est en lâchant son mental, en se connectant à sa dimension à soi, en déployant sa propre lumière que l’on est capable de faire grandir les autres et la société toute entière. « Il n’y a pas mieux ailleurs, il y a mieux en nous. Il n’y a pas à réformer, il y a à libérer », professe l’auteure de Nouveau monde cherche nouveaux dirigeants, qui se définit comme « un agent de transformation ». « Transformer, explique-t-elle, c’est aller au-delà de la forme, par essence impermanente. Nous souffrons lorsque nous prenons la forme pour la solution ultime, au lieu de nous en détacher pour imaginer autre chose. » Dans notre monde en mutation, cette quinquagénaire, mariée et mère de deux garçons, parie que l’innovation sera humaine et non technologique. Audacieux, mais enthousiasmant tant Nathalie Rodary vibre de sincérité.

Un destin éclairé à l’aune de la souffrance

Toute petite, elle pressent qu’elle est venue au monde pour accomplir un chemin d’éveil. Est-ce un hasard si son nom signifie la roue et son prénom la naissance ou la renaissance ? Elle y voit aujourd’hui le signe de sa vocation à gagner d’autres niveaux de conscience et à les faire partager. Dans sa famille de cadre sup’ où l’on est intellectuel, mais pas spirituel, sa joie de vivre se heurte à des souffrances, celle de violences verbales, celle aussi du handicap mental de sa seconde sœur. Nathalie, la cadette des trois filles, partage un temps sa chambre et tisse avec elle des liens très forts. « Catherine a une incroyable dimension d’empathie. Pour moi, les handicapés mentaux de la famille, ce n’était pas elle, mais les autres. » N’empêche, le rejet de sa sœur la révolte et l’enferme, elle qui n’ose plus inviter ses amis à la maison. Au gré des expatriations dictées par la carrière de son père, Nathalie, souvent livrée à elle-même, trouve un exutoire dans l’écriture où germe sa quête de spiritualité. À l’adolescence, un cousin aîné, étudiant en médecine, lui prête un livre sur les guérisseurs qui opèrent aux confins de l’Asie simplement en imposant les mains. C’est le déclic. La jeune fille déroule ce fil jusqu’à s’intéresser à la culture asiatique et aux enseignements bouddhistes. Sans intégrer une chapelle, elle se réclame volontiers du Grand Véhicule (ou Mahayana) qui propose une transformation de soi tournée vers les autres.

« Il n’y a pas mieux ailleurs, il y a mieux en nous. Il n’y a pas à réformer, il y a à libérer. »

Son diplôme d’école de commerce en poche, l’affranchie voyage deux mois, sac à dos, en Thaïlande et en Malaisie. Une révélation. « Là-bas, je me suis sentie étonnamment chez moi. » Au point qu’elle songe à s’y établir. Ce qui l’a retenue ? Sa sœur, si vulnérable et sensible. « Notre lien m’empêchait de me détacher d’elle géographiquement. Et puis, j’avais l’intuition d’une mission à réaliser, ici, en France. »

Au long de ses premières années d’activité salariée, l’idée fera son chemin d’accompagner les autres. Si elle s’initie au Yi King, cet art chinois de la transformation, codifié dans un livre millénaire, la coache invite à la connaissance de soi à partir des quatre Nobles Vérités du bouddhisme – l’existence de la souffrance, ses causes, ses remèdes et le chemin pour les dépasser. « Cette voie d’Éveil de la conscience est indissociable du progrès en général et de celui du management en particulier », affirme la fondatrice, il y a sept ans, d’un club APM (association pour le progrès du management) dédié au leadership humaniste. L’occasion pour Nathalie Rodary d’embarquer la quinzaine de chefs d’entreprise de son groupe dans un voyage « transformant ». L’expérience est conduite en 2017 au Myamar (Birmanie) où, un an plus tôt, à la faveur du Women’s Forum, elle a fait la connaissance d’Aung San Suu Kyi. La lauréate du prix Nobel de la Paix a promis d’accorder une conférence à cette petite délégation de dirigeants français, qui vivront bien d’autres temps forts, comme la rencontre avec des moines ou la visite d’un orphelinat à Yangon. « Il y a eu un vrai lâcher-prise et beaucoup de changements professionnels au retour », s’enthousiasme celle qui est aussi une artiste.  Auteure et interprète d’une quinzaine de chansons, Nathalie Rodary adore vibrer en musique à l’unisson – elle a fait plusieurs scènes au Cirque d’Hiver ou encore salle Gaveau. Entre Lyon, où elle réside désormais, et Paris, elle trouve encore le temps de donner des conférences sur le thème « Se connaître, se reconnaître ». Pour nous reconnecter à notre raison d’être.

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Fabrice Groult

Fabrice Groult est un aventurier, photographe et bouddhiste qui parcourt le monde depuis son plus jeune âge. Après avoir étudié le bouddhisme en Inde, il s'est engagé dans un voyage de dix-huit mois à travers l’Asie qui l'a mené jusqu'en Himalaya, où il a découvert sa passion pour la photographie. Depuis, il a parcouru le monde pour capturer des images de beauté et de sagesse bouddhiste. Il a été guide pendant dix ans, et est aujourd'hui journaliste chez Bouddha News.

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