Le repos obtenu par tous les êtres suite à la destruction
Du mal-être en ayant œuvré pour le mieux,
Je le salue d’une joie intense.
Que tous les affligés s’établissent dans le bien-être !
Je salue avec joie les hommes qui se sont délivrés du mal-être.
Je salue avec joie les protecteurs qui sont bodhisattvas et Bouddhas.
Et je salue avec joie, parmi les maîtres
Ceux qui ont fait naître une aspiration océanique
Qui apportent bien-être à tous, et à tous leur secours.
J’en appelle aux Éveillés
Qu’ils allument le flambeau du Dharma
Pour ceux tombés dans le mal-être par ignorance.
Pour que les Victorieux ne soient pas pris
Du désir de souffler sur la flamme de leur vie,
Je les implore, les mains jointes au cœur
De demeurer pour un temps infini
Afin que ce monde ne soit plus enténébré
Les lumières que j’ai pu apporter jusqu’à présent,
Que je sois par elles celui qui saura apaiser les maux !
Je suis, pour ceux qui défaillent, le remède, le médecin et l’infirmier,
Qui soigne le mal de telle sorte que jamais il ne renaisse.
Par une pluie de mets et de breuvages
Puissé-je mettre à bas les tourments de la faim et de la soif
Et lors des temps de famine devenir moi-même boisson et nourriture.
Que je sois pour les miséreux un inépuisable trésor !
Et par des voies diverses et désintéressées,
Puissé-je servir au-devant de tous les besoins !
Toutes les richesses dont je suis la source,
Tous ces mérites accumulés dans les trois temps,
Je les abandonne sans arrière-pensée,
Pour que s’accomplisse le bien de tous les êtres.
L’entier retrait est Nirvana
Et mon âme en est avide
Aussi, puisque je dois laisser tout ce qui m’est cher,
Que tout le meilleur leur soit donné !
Ce « Moi », j’en fais un bonheur pour tous les êtres.
Qu’ils me tuent, qu’ils me conspuent
Et me couvrent sans cesse de poussière
Qu’ils jouent avec mon corps,
S’en moquent et s’en amusent
Mon corps leur est donné
À quoi bon m’en soucier !
Qu’ils lui fassent faire des actes qui soient un véhicule de bien-être !
Et qu’aucun dommage, jamais, ne prenne fondement sur moi !
Que les pensées courroucées et violentes de ceux qui m’en veulent
Soient la cause qui les mène à la réalisation de toutes les fortunes !
Ceux qui me calomnient, celui m’injurie
Cet autre qui me tourne en dérision,
Que tous participent de l’Éveil !
Je suis le protecteur de ceux qui sont sans protection
Et je suis le guide de ceux qui voyagent
Pour ceux qui désirent traverser, je suis le navire, le pont, et le gué
Je suis la lampe de ceux qui cherchent la lumière
Je suis le lit de ceux qui veulent le repos
Je suis le serviteur de ceux qui ont besoin d’être assistés
Je suis cela pour tous les vivants !
Je suis la perle qui exauce les vœux,
La corne d’abondance, la formule magique,
La panacée, l’arbre aux miracles
Et la vache sacrée des désirs comblés
Je suis cela pour tous les vivants !
La terre et les autres éléments sont pleinement disponibles
Pour les innombrables êtres qui peuplent l’espace tout entier
Ainsi pour ceux qui appartiennent à l’espace
Et qui ont de quelque manière l’être pour élément
Que je sois le soutien sans faille de leur vie,
Aussi longtemps que tous ne seront pas satisfaits !
(Chapitre III – Saisir l’Appel de l’Éveil)
Traduit du sanskrit par Alexis Lavis : La conscience à l’épreuve de l’Éveil. Lecture, commentaire et traduction du Bodhicaryavatara de Shantideva (Cerf, Collection Sagesses d’Asie, 2018)