L’auteur a publié un livre, Apprivoiser l’éveil, dont les critiques unanimes ont dit qu’il renouvelait le genre et dans lequel il revisitait, à sa façon, littéraire et zen, le fameux conte oriental du dressage du buffle à travers dix images qui sont comme autant de métaphores du cheminement spirituel et de la quête de soi. Il conférait une dimension pratique et moderne à ces allégories qui, sous leur simplicité, cachent un message profond.
En ce début d’année du Sanglier de Terre, Pierre Taigü Turlur, professeur de langue et littérature française à Kyoto, de surcroît moine zen dans la branche Soto, publie un nouvel essai sur les kôans, ces formules et histoires abruptes qui, dans le Ch’an chinois puis dans les écoles zen japonaises, servaient à mettre l’esprit de ceux qui les écoutaient face au vide et au mystère. L’une des plus connues est évidemment la fameuse question : « Quel était votre visage avant la naissance de vos parents ? » Mais il en existe infiniment d’autres comme cette demande d’un disciple à son maître : « Quelle est la vérité ? » Et celui-ci de répondre : « Le cyprès au fond du jardin ». On peut expliquer celle-ci en montrant sa dimension écologique et sacrée, car le cyprès peut symboliser la force de la nature, la beauté du jaillissement de la vie et la nécessité de leur contemplation pour se ressourcer.
Voici une variante : « La vérité… », répond le maître en posant une nouvelle question : « As-tu mangé ? » Oui, dit le disciple. « Alors, va laver ton bol »… Kôan qui me fait irrésistiblement penser à celui, chrétien, de Sainte Thérèse d’Avila qui dit : « Mes sœurs, Dieu se trouve dans les casseroles de vos cuisines ! » C’est en effet dans la concentration de l’instant présent que se niche l’insaisissable vérité. Pierre Taigü Turlur nous emmène dans une énigmatique série de questions qu’il résout dans les mots de notre temps avec un talent rafraîchissant