En ces temps de confinement où notre vision du bonheur est interrogée à la fois sur le plan individuel et collectif, il est passionnant de se plonger dans cette magnifique Histoire mondiale du bonheur, qui nous montre à quel point l’homme n’a cessé de chercher le moyen de sublimer son passage sur Terre et de dépasser les aléas de l’existence. Ils ne répondent jamais à nos désirs. Ils les transcendent et nous enseignent pour nous tourner vers une paix plus profonde.
Sommes-nous sur Terre pour être heureux ? L’histoire mondiale du bonheur, conçu sous la direction de François Durpaire, nous offre une réponse magistrale de l’homme du Cro-Magnon à nos jours. Plus de soixante historiens, philosophes, sociologues, anthropologues, psychologues livrent des réponses qui nous éclairent sur les aspirations profondes de l’humanité.
À travers ce voyage au cœur du bonheur, nous découvrons que l’homme n’a cessé de le chercher sans vraiment y parvenir, mais sa quête façonne sa vie sous des formes infinies. Cet ouvrage nous ramène à la source du bonheur. À son étymologie d’abord, qui nous révèle que ce mot vient de « bon eür ». « Eür » est issu du latin « augurium » qui désigne l’appui accordé par les dieux à une initiative. Si, en effet, dans toutes les traditions spirituelles, le divin emprunte une grande part dans le bonheur des hommes incompatible avec le rejet des dieux ; de nos jours, il est devenu une science, un marché, un thème à la mode. Ce cheminement est fascinant, mais est-il réellement le signe d’une évolution ? Ces sciences du bonheur révolutionnaires semblent être des reformulations rationnelles des thèmes traditionnels de la sagesse. On masquerait la spiritualité derrière la science. La méditation préconisée dans tous ces courants n’est plus spirituelle mais scientifique : elle guérit, apaise et soigne. Il n’est plus ici question de croyances, mais d’efficacité quant aux techniques adoptées vers un mieux-être. Le Dalaï-Lama s’est rapproché des études scientifiques pour prouver ce dont la tradition parle depuis des siècles : l’harmonie, l’apaisement, la méditation et la bienveillance sont à la base d’un bonheur durable et collectif. Ce n’est plus une croyance, c’est un fait. Reste à chacun d’emprunter la voie la plus proche de lui sans calquer sa vie sur une mode, mais sur une cohérence intérieure.
Les traditions ont peut-être déjà tout dit : quand l’être est apaisé, tout le reste en découle, le travail, les relations, la communauté. Cela n’empêche pas les épreuves. On est simplement plus armé pour les traverser. Catherine Barry, dans son très beau texte consacré au bonheur selon Bouddha, nous le rappelle en effet. Elle souligne que la méditation bouddhiste nous invite à accepter l’instant présent avec une bienveillance joyeuse sans rien rejeter. Nous serions un tas de glaise à pétrir pour nous transformer. Ne sommes-nous pas là au cœur d’une vision du bonheur universelle et éternelle, déclinée sous de multiples formes ? Catherine Barry rapporte des phrases du Dalaï-Lama qu’elle a interviewé : « Si vous possédez la paix intérieure et la tranquillité de l’esprit, rien ne pourra perturber votre existence et vous serez pleinement heureux, quelles que soient les circonstances ».
Nous découvrons à travers cet ouvrage que même les traditions et les courants philosophiques qui encouragent à profiter des biens terrestres et jouir d’abord de la vie aspirent en réalité à une harmonie plus haute, libre des événements extérieurs.
L’histoire mondiale du bonheur s’achève sur une écologie du bonheur. Le retour à une sagesse de la terre est le signe d’un retour à la source.