Sangha : la guerre de l’éveil

Publié le

Une sangha est une collection d’êtres conscients, éveillant des personnes travaillant à sortir du sommeil zombie de la condition humaine. Ils cherchent à exister sous un niveau d’être supérieur, aligné avec une autorité supérieure à leur propre auto-absorption. En tant que tel, il n’y a pas de place pour se livrer à l’animosité, à la jalousie, à l’autojustification ou aux opinions autoproclamées. Je dis « se livrer », car évidemment de tels sentiments et bien d’autres surviennent lors d’un contact étroit avec des personnes différentes. Dans la vie mondaine, nous pouvons satisfaire toutes ces multiples façons de soutenir notre histoire particulière ou notre biographie chérie et notre prétendu rôle sociétal. Dans le contexte d’une véritable assemblée spirituelle de pratiquants, c’est par la fenêtre. C’est ce que l’on entend par espace sacré, non pas comme une idée moralisatrice ou exagérée de notre objectif sacré, mais comme un lieu d’intention vers la libération de l’existence non consciente.

Le problème est qu’il y a deux factions belligérantes qui entrent dans n’importe quel travail spirituel, et c’est un fait universel. Il y a l’individu central, la conscience qui s’éveille, l’« âme » naissante, si vous voulez. C’est comme un bébé à ce stade. Puis il y a toute une armée de modes d’être mécaniques. Il y a votre type constitutionnel inhérent, votre astrologie et votre constitution génétique. Ensuite, il y a le soi social merveilleusement sculpté et fabriqué (c’est-à-dire un personnage ou un masque). Et enfin il y a le corps lui-même, une machine à tic-tac parfaite qui ne nécessite pas d’habitant conscient. Oui, la conscience pourrait envahir et posséder ce merveilleux robot, mais ce n’est qu’une possibilité, une étoile lointaine. Cette situation est encore compliquée par le fait que le corps a ses propres habitudes, mais peut être coopté par ces émotions et schémas de pensée, désirs et aversions programmés. Et la mécanique du corps suscite toutes sortes d’émotions et de pensées associées.

À la base, nous essayons de sensibiliser aux aspects mécaniques de la vie. Nos mouvements corporels, nos réactions et nos manières sont tous hautement inconscients. Réagir tout le temps. Les émotions s’expriment constamment sans notre « intervention ». Nous avons l’impression que « j’ai » dit quelque chose, mais tout cela est une réponse de stimulus répétée et pratiquée. Si cela venait de notre moi conscient, ce serait différent A chaque fois. Pas nécessairement les mots ni même le ton ou l’inflexion. Ce serait se sentir différent dans chaque cas. La conscience, de par sa nature, n’est jamais répétitive. Un moment conscient est unique, peu importe combien de fois la même situation ou action se produit. C’est frais.

Cela représente une lutte, la vraie lutte du travail spirituel. Il peut sembler que nous allons à l’encontre des objectifs et du but de la culture, la structure économique et sociale sophistiquée de la vie. Mais c’est l’automatisation du corps et de la personnalité — biologie et biographie — qui est l’ennemie de l’éveil. Heureusement, les moments, des millions et des millions, ne manquent pas pour l’éveil. Ce sont ces petits efforts, s’éveillant à la présence et ne se livrant pas immédiatement à des impulsions, des sensations, des sentiments ou des pensées, qui s’additionnent pour former «quelque chose» en nous. C’est vraiment le tantra ou l’alchimie intérieure qui crée la « pierre philosophale » en soi. C’est l’or produit dans la forme à la suite de l’interaction de la conscience, de l’électromagnétisme (photons) et de la biologie. En fait, ce sont toutes des formes d’énergie, certaines plus lentes que d’autres.

C’est l’exigence minimale d’une sangha. Si la majorité ne travaille pas pour être éveillée à chaque instant, dans le corps, dans la parole, dans les pensées, alors qui est là pour continuer à réveiller ceux qui ne sont pas en mode conscient ? Ce peut être l’enseignant qui comprend ces principes et « gère » la conscience du groupe. Mais les étudiants doivent aussi prendre leurs responsabilités, car c’est une partie essentielle de leur formation. Après tout, ils doivent se réveiller.

Une sangha peut être un club social, un groupe philosophique, un partage de visions et d’idéaux, faisant des pratiques fascinantes et cherchant le téléchargement de la force spirituelle. Mais à moins que la lumière de la conscience ne s’éveille en quelques instants et pendant une longue période, la mécanique l’emporte. S’arrêter, juste s’arrêter, c’est une façon de voir la machinerie grincer. Ce moment de création d’un vide dans le roulement des mécanismes biologiques, émotionnels et mentaux change toute l’alchimie de l’expérience. C’est un combat contre toute la force descendante de la création, de l’entropie. C’est un renversement du courant vers l’unité – la pré-création pour ainsi dire. Cela peut commencer par être une sangha d’un seul.

Photo of author

François Leclercq

François Leclercq est le fondateur de Bouddha News, site internet qui a pour but de diffuser des informations et des conseils pratiques sur le bouddhisme et la spiritualité. François Leclercq est né et a grandi à Paris. Il a étudié le bouddhisme à l'Université de Paris-Sorbonne, où il est diplômé en sciences sociales et en psychologie. Après avoir obtenu son diplôme, il s'est consacré à sa passion pour le bouddhisme et a voyagé dans le monde entier pour étudier et découvrir des pratiques différentes. Il a notamment visité le Tibet, le Népal, la Thaïlande, le Japon et la Chine.

Laisser un commentaire