Mort et décadence, naissance et renaissance : cycles de la vie dans la nature et en nous-mêmes

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Vignes d’automne, France, 2022. Photo de l’auteur

Là où j’habite, on penche peut-être vers un été étouffant, mais des pensées d’automne frappent à la porte. Quand j’étais enfant, les mois d’automne me laissaient nostalgique. Au fur et à mesure que le temps devenait plus froid et que les jours raccourcissaient, il semblait que tout changeait pour le pire. En plus de cela, il semblait que les arbres étaient en train de mourir. Au moins, je pensais qu’ils étaient en train de mourir alors que leurs feuilles changeaient de couleur et tombaient au sol. Les adultes de ma vie disaient que les arbres « ne faisaient que dormir », mais je ne les croyais pas. « Comment un arbre pourrait-il perdre toutes ses feuilles et rester en vie ? » Je me demandais.

Au fur et à mesure que je grandissais et que quelques automnes de plus passaient, j’ai réalisé que ces adultes avaient partiellement raison. Oui, les arbres dormaient, retiraient des nutriments de leurs branches et emmagasinaient des sucres pour les mois d’hiver. Mais d’autres choses se passaient aussi. J’ai appris que les feuilles ne sont pas vraiment vertes. Ils ne ressemblent à cela que parce qu’ils sont remplis de chlorophylle. Ce n’est qu’à l’automne, lorsque la chlorophylle se dessèche et que les feuilles sont sur le point de mourir, que nous voyons leurs vraies couleurs.

(La mort, dans) son essence la plus profonde ne nous est pas contraire (comme on peut parfois le supposer), mais c’est plus connaître la vie que nous ne le sommes dans nos moments les plus vitaux. Je pense toujours qu’un si grand poids avec sa pression énorme a en quelque sorte pour tâche de nous forcer dans une couche de vie plus profonde et plus intime afin que nous puissions en sortir d’autant plus dynamiques et fertiles.

(Lettres sur le deuil de Rainer Maria Rilke (La revue parisienne))

Feuille d’automne, France, 2022. Photo de l’auteur

Lorsque les feuilles tombent au sol, elles fournissent des habitats à une foule d’insectes qui ont besoin de lieux de repos pour l’hiver. Les feuilles isolent le sol afin que les vers de terre dans le sol ne gèlent pas. Enfin, lorsque les feuilles se décomposent et se décomposent, elles fertilisent le sol, ajoutant des nutriments pour soutenir la croissance des arbres et autres plantes au printemps.

Au fur et à mesure que j’en apprenais davantage sur les processus naturels du monde, mon inconscience enfantine a été remplacée par des connaissances et j’ai acquis une appréciation de la nature impermanente des arbres. À mesure que nous vieillissons, le bouddhisme nous aide à acquérir cette même appréciation de la nature éphémère des gens. En tant qu’êtres humains, par nature, nous naissons, vieillissons, tombons malades et finissons par mourir. Au début, vieillir est une bonne chose. C’est une transition qui ajoute de la richesse et de la complexité à nos vies. A 16 ans on peut conduire, à 18 ans on part pour l’université et à 25 ans on peut louer une voiture ! Mais il arrive aussi inévitablement un point de basculement lorsque la vie cesse de nous donner des choses et commence à nous les reprendre.

L’auteur en France, octobre 2022. Photo de Marie-Laure Jacquet

Le vieillissement signifie que notre corps commence à se dégrader. Les maladies peuvent devenir plus fréquentes et nous pouvons avoir du mal à suivre les nouvelles technologies ou la culture populaire. Ces changements sont au mieux désagréables, et au pire peuvent être source d’immenses souffrances. Cette souffrance est multipliée par un monde séculier enraciné dans l’ignorance ; un monde qui nous dit que notre corps ne devrait jamais changer. Selon les publicités qui apparaissent sur nos appareils numériques, chaque personne de 50 ans devrait avoir l’air d’en avoir 25 et chaque personne malade a juste besoin d’adopter un état d’esprit plus positif ou d’acheter les derniers suppléments.

En revanche, le bouddhisme enseigne que le changement est une partie naturelle et incontournable de la vie. Tout dans l’univers, y compris les gens, est dans un état constant de transition. Si nous pouvons apprendre à accepter les transitions de la vie, nous pouvons les apprécier de la même manière qu’un enfant pourrait apprécier la beauté poignante des feuilles mortes. Lorsque nous abordons le processus de vieillissement avec cette nouvelle sagesse, nous trouvons la beauté au milieu des articulations douloureuses et des cheveux grisonnants.

Vignes d’automne, France, 2022. Photo de l’auteur

Notre vigueur juvénile est remplacée par une multitude d’expériences de vie qui nous aident à faire des choix meilleurs et plus réfléchis. Nous réalisons qu’une soirée tranquille avec de bons amis peut être plus agréable qu’une soirée en ville entourée d’étrangers ou qu’un voyage fantaisiste. Et nous trouvons plus de temps pour la pratique spirituelle lorsque nous abandonnons des désirs dépassés.

Plus que cela, alors que les feuilles d’automne tombent de notre arbre proverbial, nous nous rendons compte qu’elles font place à une nouvelle croissance, même à la sagesse. Cela peut ressembler à une nouvelle activité ou à l’approfondissement de notre relation avec un ami ou un partenaire. Lorsque nous abordons le processus de vieillissement avec un esprit d’acceptation, le monde s’ouvre à nous. Et la souffrance qui est normalement associée au processus de la naissance, du vieillissement, de la maladie et de la mort peut diminuer. Au lieu de cela, il est remplacé par une joie et un contentement tranquilles alors que nous regardons les feuilles mortes de notre passé et attendons avec impatience la nouvelle croissance qui émergera dans notre avenir, aussi limité soit-il.

Feuilles d’automne en décomposition, France, 2022. Photo de l’auteur

Comme un enfant qui regarde les feuilles orange et rouges de l’automne, qui comprend maintenant qu’elles annoncent de beaux jours après l’hiver, nous vivons le vieillissement comme la preuve que la vie nous réserve de nouveaux défis dignes d’intérêt. Et quand le jour vient enfin où notre coquille humaine arrête sa fonction mondaine, nous pouvons la laisser partir sans crainte. Si nous avons cultivé la méditation, nous savons que la fin d’une vie entraîne le début d’une autre. De la même manière que l’automne conduit à l’hiver puis à un nouveau printemps.

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François Leclercq

François Leclercq est le fondateur de Bouddha News, site internet qui a pour but de diffuser des informations et des conseils pratiques sur le bouddhisme et la spiritualité. François Leclercq est né et a grandi à Paris. Il a étudié le bouddhisme à l'Université de Paris-Sorbonne, où il est diplômé en sciences sociales et en psychologie. Après avoir obtenu son diplôme, il s'est consacré à sa passion pour le bouddhisme et a voyagé dans le monde entier pour étudier et découvrir des pratiques différentes. Il a notamment visité le Tibet, le Népal, la Thaïlande, le Japon et la Chine.

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