Bouddhisme et psychanalyse

Cher Dr Trinh,
J’ai 22 ans et suis en analyse depuis cinq ans. J’aime beaucoup la psychanalyse, ce « travail » sur soi, sur les causes profondes de son mal-être, et j’y vois là une passerelle avec le bouddhisme qui enseigne à chacun de réaliser sa nature profonde, si j’ai bien compris. Mais le bouddhisme dit aussi, je schématise, qu’il faut observer ses émotions puis s’en séparer pour ne pas se laisser envahir par elles. À l’inverse, la psychanalyse conseille de les étudier, les décortiquer, pour apprendre à vivre elles. Quelles sont les principales différences entre bouddhisme et psychanalyse sur ce sujet ?

Docteur Dinh Hy Trinh : Chère Sophie,

Je comprends votre attachement à la psychanalyse, qui peut être bénéfique dans les cas où l’on réussit au fur et à mesure à « dédramatiser » en quelque sorte les souvenirs traumatisants du passé : on les ressort, à chaque fois accompagnés de moins en moins d’émotions négatives.

La démarche bouddhiste, elle, est exactement à l’inverse : on ne remue pas les souvenirs du passé, on les laisse se décanter, un peu comme une eau trouble dans un verre, jusqu’à ce qu’elle redevienne claire. Pour cela, en portant toute son attention au moment présent, on ne laisse pas de place au vagabondage mental où l’on se ressasse les souvenirs.

Et lorsque l’on conseille suivant la philosophie bouddhiste d’observer, d’analyser ses émotions négatives, de façon à les faire disparaître d’elles-mêmes, il s’agit d’émotions éprouvées dans la situation présente et non pas celles réveillées par l’évocation du passé.

Bref, pour moi, la différence réside en ce que la psychanalyse traite le passé, alors que le bouddhisme ne traite que le présent, puisque pour lui seul le présent existe réellement.

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